De l'étonnement, de l'appréhension, ce sont les premiers sentiments de la majorité des jurés d'Assises. Des citoyens lambdas, âgés entre 23 et 70 ans, résidant en Mayenne et inscrits sur les listes électorales, étaient convoqués lundi dernier, au Tribunal de Grande Instance (TGI). Pendant 10 jours, ils vont voir l'envers du décor. Ils vont découvrir les rouages d'une justice française, bien souvent fantasmée, ou inconnue. Une première lettre au mois de juillet, les a informés de la probabilité qu'ils soient choisis pour être juré. « Je n'y ai pas prêté attention. Je me suis dis qu'avant d'en être, il y avait du monde », explique une retraitée. Et pourtant en décembre, comme 35 autres personnes, elle a reçu une convocation au TGI. D'univers différents, tout le monde est venu. « On n'a pas le choix, si on ne justifie pas son absence, c'est 3 750€ d'amende », réplique une jeune femme. Personne ne sait très bien ce que l'on attend d'eux. « Les jurés d'Assises réalisent un acte civique. Ils apportent leur regard de citoyen sur les faits, et donnent pendant le délibéré, leur avis sur la culpabilité et la durée de la peine à prononcer », explique Laurent Rieuneau, conseiller à la cour d'appel et président d'Assises. « Ces sessions permettent aux citoyens de comprendre les difficultés rencontrées par la justice. L'indépendance de la justice ne requiert pas de sentiment. C'est l'apprentissage le moins évident pour les citoyens », complète le procureur. La session dure 10 jours. Une indemnité d'audience de 78€, des indemnités kilométriques et les repas leur sont remboursés. Les citoyens assesseurs, titulaires ou suppléants, vont devoir se rendre disponibles pour juger des délits graves. Six ou neuf citoyens assesseurs seront tirés au sort, parmi les 35 de la liste, avant le début du procès. Vie professionnelle ou personnelle, il faut prendre ses dispositions. « Mes patrons m'ont mis en vacances durant la période », révèle une salariée de 31 ans. D'autres s'arrangent avec leur employeur. Ou pas. Comme Béatrice, 51 ans :« je suis garde-malade et la personne dont je m'occupe ne peut pas rester seule. C'est à regret que je dois être radiée de la liste ». Beaucoup ne pensait pas faire partie des citoyens-assesseurs, pourtant la plupart prennent ça « comme une expérience ». Patricia, 49 ans : « je suis curieuse de découvrir la justice de l'intérieur, autrement qu'à travers les média. » Avant de venir, certains se sont renseignés auprès de connaissances qui ont déjà été convoquées. « L'idée de juger quelqu'un me fait peur. C'est quelque chose d'important, confie Elianne, 56 ans, mais des proches déjà passés m'ont rassurée ». Les affaires qui passent aux Assises relèvent de délits graves (meurtres, viols...). Le président des Assises, pédagogue avec ses jurés amateurs, tient absolument à les rassurer : « vous allez juger des humains autrement que sur un coin de table. Avec votre expérience personnelle et professionnelle vous allez aider la justice à faire son devoir ». Il présente aussi toute l'importance de leur rôle : « vous découvrirez que les humains sont capables de choses détestables. En tant que juré, vous devrez aussi prendre en compte beaucoup d'aspects bien souvent ignorés. On ne devient pas criminel par hasard ». Les jurés vont le découvrir le temps de la session. Chaque Mayennais peut à son tour être convoqué, et sortir changé de cette expérience.
Marion Dubois
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.